Bon pied, bon œil et moustache d’officier prussien, Edouard Huguelet est à 82 ans le vétéran de la presse suisse. Ce journaliste au long cours ne se départit jamais de son humour et de sa discipline au travail. Retour sur une longévité hors pair.
Journaliste technique, Edouard Huguelet est connu loin à la ronde. Ce rédacteur en chef du Marché Suisse des Machines (appelé par la suite MSM) pendant 27 ans, est aujourd’hui le doyen de la presse suisse et la gâchette du magazine Le MicroMécanicien. Cette fine plume de la microtechnique continue à informer nos lecteurs sur les dernières évolutions de cette industrie.
D’où vient votre envie de continuer à écrire ?
Rédiger répond pour moi à un vrai besoin. Je suis actif dans ce domaine depuis 1980 et j’éprouve toujours autant de plaisir à vulgariser des sujets très complexes. Ecrire des articles nécessite d’être à jour en permanence et maintient l’esprit alerte. Je comprends certes les retraités qui nourrissent une passion pour l’archéologie ou la photographie, mais passer ses journées rythmées par les apéros et la camomille n’est pas ma tasse de thé. Mon projet n’est pas de mener une retraite oisive !
Vos débuts dans la presse technique ?
Au début, les moyens étaient très limités pour rédiger des articles. Il fallait bien planifier son temps, car la revue sortait tous les quinze jours et j’étais seul à la tâche. Il y avait une pléthore d’articles à livrer et il fallait gérer également toutes les étapes de la production du magazine. Un travail très lourd. Avant cela, j’avais débuté ma vie professionnelle dans les années septante d’abord comme ingénieur mécanicien et par la suite je rédigeai des catalogues, des prospectus et des communiqués de presse pour un constructeur de machines.
Votre meilleur et pire souvenir ?
En 1986, je planais littéralement lorsque la revue MSM m’avait embauché comme rédacteur responsable et par la suite rédacteur en chef. La consécration absolue. La période la plus critique a trait à l’avènement de l’informatique dans la rédaction. Un cauchemar ! Une fois, les ordinateurs installés, il a fallu rapidement suivre des cours et s’esquinter les yeux sur des manuels ardus et mal rédigés.
Quel regard portez-vous sur la presse technique actuelle ?
Les titres ont beaucoup évolué, les sujets sont plus variés et leur mise en page plus aérée. Cependant, leur pagination est actuellement en régime minceur permanent. Les numéros du MSM d’antan faisaient facilement cent pages et comportaient une proportion de publicité de 50%.
Votre sentiment d’être le doyen national des journalistes ?
Pas grand-chose pour moi. En revanche, mes collègues journalistes sont parfois assez intrigués. Je note que ces publications éprouvent des difficultés à trouver de bons rédacteurs techniques. Bien souvent, elles font appel à d’excellents ingénieurs, mais qui manquent de recul pour comprendre les besoins du lecteur. En fait, le journalisme technique est un métier qui requiert, outre une plume bien affutée, une bonne dose de didactisme et le sens de la vulgarisation.
Quel est l’avantage de la presse papier ?
Avec le papier nous acheminons l’information vers le lecteur. Sur Internet, nous devons chercher de l’information. Avec un magazine spécialisé comme le nôtre, le lecteur tombe sur un sujet qu’il n’aurait pas forcement cherché en ligne. De plus le plaisir de la lecture sur papier est supérieur à celui que provoque le défilement du texte sur écran.
Votre avis sur cette nouvelle aventure du MicroMécanicien ?
Cette revue est bien ciblée. Et elle vient combler un vide car la micromécanique dans les autres revues n’est pas traitée de façon exhaustive. Du reste, la microtechnique concerne plus de 80% des emplois dans l’Arc Jurassien. Nous sommes aux premières loges pour observer les évolutions de cette filière. Enfin surtout moi (rires d’Edouard).
Propos recueillis par Michele Carraciolo di Brienza
Les ordinateurs installés, il a fallu s’esquinter les yeux sur des manuels traduits en français fédéral.
