L’inventeur qui mariera la mécanique automobile à l’horlogerie

 De Witt Academia Mathematical caseback
 De Witt Academia Mathematical caseback

Par Anna Aznaour

Autodidacte, Jérôme de Witt a su concevoir une liqueur, construire des hôpitaux, puis inventer des grandes complications horlogères pour sa marque éponyme. Portrait d’un « paysan » au sang bleu.

« Il y a beaucoup de gens qui sont fantastiques, mais ils ne le savent pas », affirme Jérôme de Witt. Éminemment positif et ouvert d’esprit, l’homme est avant tout un épris de liberté. Celle d’aller où le cœur le porte et la curiosité l’invite. Ainsi, ses 18 ans à peine révolus, il se lancera dans la vie active en laissant tomber des études de mathématiques. Engagé d’abord comme représentant par un grand distributeur des spiritueux, il inventera rapidement sa propre liqueur : « Mandarine Napoléon ». Un clin d’œil à ses origines. Le natif du Périgord (France) qui se dit volontiers « paysan » est en réalité le descendant direct de Napoléon Bonaparte et du roi Léopold II de Belgique.

Des aïeux prestigieux dont la célébrité n’empêchera nullement Jérôme de Witt de prendre une valise vide et de se lancer dans des projets de construction en Afrique. Puis, dans des pays arabes, alors en pleine éclosion économique. « Concevoir un projet, et ensuite trouver et fédérer une équipe autour de sa réalisation, était mon travail à cette époque », confie-t-il. Mais, une fois les choses « sur les rails », l’entrepreneur passait au prochain projet. L’horlogerie, elle, est arrivée dans sa vie bien remplie en 1992. Installé à Genève avec son épouse Viviane, il allait y découvrir un univers nouveau, sans se douter un instant que, treize ans plus tard, ses inventions allaient le chambouler. Et le déclic lui viendra d’une autre passion, celle pour la mécanique automobile.

« Démonter régulièrement les vieilles voitures de ma collection pour les réparer m’avait obligé à apprendre tout de leur fonctionnement. D’où l’idée d’appliquer ces principes mécaniques dans l’horlogerie », raconte Jérôme. Parmi eux, le différentiel, qui permet de réguler la tension lors du remontage d’une montre mécanique et, ce faisant, d’empêcher son usure. Ou alors, celle de la force constante, dont la transposition fournit au système d’échappement une puissance en continu. Parmi la vingtaine de brevets déposés, il y a celui appelé Tourbillon Différentiel, récompensé en 2005 lors du prestigieux Grand Prix d’Horlogerie de Genève (GPHG). Sa complication prémunit la montre mécanique contre les perturbations induites par la gravitation terrestre.

Sans oublier l’invention du système improbable de Tourbillon Volant (Academia Mathematical). Ici, le temps est affiché non pas par des aiguilles qui font le tour du cadran, mais par un système unique qui fait « sauter » les heures et les minutes. En seulement vingt ans, quelque 700 modèles de montres sont sortis de l’esprit fertile de Jérôme de Witt. À part l’inventivité, la marque de fabrique de sa manufacture est ce design des colonnes impériales qui ornent le boîtier des garde-temps DeWitt. À 73 ans, l’inventeur constate : « Tout existe. Et c’est juste autour de nous. Il suffit d’oser voir, essayer et croire. »

« Tout existe. Et c’est juste autour de nous. Il suffit d’oser voir, essayer et croire. »