Le lean, philosophie de DIXI

Flexibilité, réactivité et remise en question permanente en lien avec le lean management en vigueur chez DIXI Polytool depuis 2012. Interview de son Managing Director Marc Schuler pour en savoir un peu plus sur cette nouvelle méthode de penser le travail.

Comment se porte DIXI Polytool depuis la fin de la pandémie ?

Nous avons récupéré très rapidement. Dès le début de la pandémie en 2020, nous avons pris des mesures drastiques : chômage partiel pour les commerciaux, les chefs de produits et le R&D. Le personnel a joué le jeu durant cette période difficile en étant plus flexible pour assurer la production. Nos partenaires financiers se sont montrés compréhensifs. Dès septembre 2021, nous avons recommencé à tourner à plein régime. En 2022, nous aurons un chiffre d’affaires supérieur à 2019. Nous avons investi massivement dans la force de vente. C’est en Suisse que nous vendons le plus. Cependant, la France est notre principal marché export. Ces dernières années, nous avons pris pas mal de parts de marché. Quatorze commerciaux essaiment sur tout le territoire français, avec un accent particulier dans l’Arc jurassien.

Depuis vos débuts comme Managing en 2009, vous avez implanté le lean management, en quoi consiste cette méthode de produire au plus juste ?

Il ne faut surtout pas le prendre au sens de production, le lean est d’abord une philosophie. Chez nous, elle est généralisée aussi bien dans la production que dans l’administration. En fait, le lean s’applique partout, aussi bien dans une banque ou dans une manufacture. Cette méthode consiste à éliminer la valeur non ajoutée. Cela peut être du surstock, ou du suréquipement de machines qui n’apporte rien à la valeur du produit. Nous avons raccourci le circuit des produits en interne. Un exemple, dans les outils spéciaux, la commande transitait par toute une chaine longue comme un jour sans pain, à savoir le bureau méthodes, le dessin, la logistique, les matières premières. Un circuit d’une semaine. C’est beaucoup trop sur un délai global de deux à trois semaines, cette énorme perte de temps mettait la pression sur tous les autres intervenants. Grâce au lean, nous arrivons au même résultat en un ou deux jours ! Aujourd’hui, nous ne travaillons plus par îlots mais par flux, ce qui nécessite beaucoup de polyvalence de la part des équipes. Ces mesures demandent beaucoup de temps, il nous a fallu trois ans, rien que pour la production. Ce travail par flux a totalement changé notre vision de la production. Mais attention, il ne faut pas confondre lean et restructuration. Pour le lean, il ne faut pas être pressé contrairement à une réorganisation de l’entreprise. Soyons clair, au début, c’était une approche Top-down, de haut en bas, mais aujourd’hui, c’est l’inverse. Par exemple, nous avons formé une quinzaine d’employés, chargés de proposer de nouveaux projets en binôme. Et bien la plupart des idées émane de la base. Nos employés ont oublié qu’ils faisaient du lean, ils l’ont largement intériorisé. Objectivement, sans le lean, nous serions aujourd’hui en mode survie. Alors que maintenant, nous sommes en phase d’expansion.

Le lean permet-il de substantielles économies ?

Nous ne sommes pas fixés d’objectifs financiers, c’est incalculable. Nous avions deux objectifs qualitatifs. Le premier consistait à réduire massivement des ruptures de stock pour les outils standard, et le deuxième, c’était de diminuer le temps de passage dans l’usine des outils standards et spéciaux. Derrière, nous savions que nous gagnerons en augmentation de chiffre d’affaires, d’EBIT et en efficience. Pour autant, il aurait été irréaliste de pouvoir calculer le ROI (Retour sur investissement) en amont car les bonnes idées surgissent grâce à l’intelligence collective. Un exemple, nous avons aménagé le travail durant les week-ends, pour faire travailler toutes nos machines de dernière génération. En passant de trois à cinq équipes, nous sommes opérationnels 7/7, 24/24 pour tous les travaux totalement automatises.

Quelles sont les perspectives de développement de vos produits ?

Nous développons sans cesse nos produits. Outre les outils répertoriés dans notre catalogue général, soit plus de 12’000 références, nous attachons une grande importance aux réalisations spécifiques, lesquelles représentent près de 40% de notre chiffre d’affaires. Nous avons aussi et surtout des solutions d’usinage mettant en œuvre des outils de coupe en carbure monobloc, au diamant PCD, outils de forme, forets, alésoirs de précision, outils de filetage. Nous venons d’obtenir le prix de l’innovation au salon Micronora, précédé par deux distinctions au Simodec et une place de finaliste au Trophée BCN en 2021 pour notre nouveau système d’outils breveté Cool+. Au département R&D, nos six ingénieurs planchent constamment sur de nouveaux outils et de nouvelles applications. Dans les matériaux de coupe, nous disposons actuellement de carbures dits «nanograins» et des progrès sont continuellement réalisés dans le domaine des couches dures de revêtement.

Quel est le positionnement de vos produits dans la branche de l’outillage ?

Je dirai qu’il se situe dans le benchmark européen du petit et du précis. Nous devons constamment nous surpasser face à une concurrence qui ne sommeille pas. D’ailleurs notre slogan : « Petit, précis, Dixi », signifie bien que notre marché de niche correspond aux exigences de la micromécanique, en particulier du décolletage, les tours automatiques CNC actuels réalisant le tournage-filetage, et pratiquement toute la gamme des opérations d’usinage, pour produire des pièces complètement usinées.

Quels sont les principaux clients en termes de branches d’activités et de parts à l’exportation ?

Nos produits sont essentiellement destinés à des marchés tels que l’horlogerie, les microtechniques et le génie médical, également le secteur de l’aéronautique. Nous avons établi en 2016 une succursale aux Pays-Bas, laquelle propose essentiellement des solutions d’usinage destinées largement au secteur électronique. 45% de notre chiffre d’affaires est dévolu à l’exportation, ce qui signifie que le marché domestique fortement implanté dans l’Arc jurassien, revêt une grande importance. Nous sommes en phase d’expansion pour une ou plusieurs acquisitions. Nous visons un doublement du chiffre d’affaires d’ici 2031. DIXI Polytool dispose également d’un atelier décentralisé avec Rollier SA basé à la Neuveville. Au fil des années cette entité s’est spécialisée sur le taraudage, tourbillonnage et forets spéciaux.

 

 

De quoi est constitué votre parc de machines de production pour la fabrication des outils ?

Essentiellement de rectifieuses-affûteuses d’outils des constructeurs de machines Rollomatic, TTB et Strausak pour la fabrication des outils de petits diamètres. Dans l’usinage des gros diamètres ce sont plutôt des machines de type Anca ou Saacke que l’on trouve chez nous. Dans les années à venir, le développement de collaborations s’orientera plus facilement sur des machines à commandes Numroto afin de faciliter la polyvalence et la polycompétence des programmeurs et affûteurs.

Propos recueillis par Edouard Huguelet